jeudi 24 janvier 2013

La dyade joueur-avatar - Introduction générale



Un monde vous attend…

Plongez dans un nouvel univers et venez rejoindre en ligne des milliers d’autres joueurs dans des royaumes de mythes, de magie et d’aventures sans limites en incarnant un personnage que vous aurez façonné.
Venez jouer…

On pourrait aisément lire ces quelques lignes au dos d’une jaquette pour un jeu vidéo. En les lisant, une envie nous assaille : aller voir ce qu’il en est, faire l’expérience de ce qu’il propose, aller explorer de nouvelles contrés, incarner un personnage que l’on aura fabriqué nous-mêmes ; tout cela sans bouger de notre siège. Cela semble incroyable. Et pourtant c’est possible. Quels sont ces jeux vidéo qui ont la possibilité de nous offrir tout cela ? Plus spécifiquement, qui sont ces personnages que nous pouvons créer ? Qui sont ces avatars – comme on les appelle dans l’univers virtuel – pour le joueur ?

Aujourd’hui l’univers virtuel tient une place de plus en importante dans notre société. En effet, depuis l’implantation des ordinateurs puis d’Internet et enfin des Smartphones dans nos foyers nous ne pouvons plus nous passer d’eux ; ils font partie intégrante de notre quotidien.
En parallèle de tout cela, un des continents de cet univers numérique semble prendre de plus en plus de place dans la sphère numérique : le jeu vidéo. Il occupe d’ailleurs aujourd’hui la première place dans les loisirs des jeunes. Devenu une véritable industrie, il génère d’ailleurs un revenu plus important que celui du cinéma. Quel engouement pour ces jeux électroniques !

Un jeu vidéo nous intrigue plus particulièrement puisqu’il attire des millions de joueurs à travers le monde : le jeu vidéo en ligne massivement multi-joueurs également appelé jeu vidéo MMORPG (Massively Multiplayer Online Role Playing Game). Il s’agit d’un jeu de rôle dans lequel le joueur est confronté à un univers dit « en ligne » (jouable par Internet) et dans lequel il va interagir avec un monde virtuel. Il s’agit d’un espace social où le joueur rencontre d’autres joueurs avec qui il interagit s’il veut pouvoir évoluer et progresser dans le jeu. Le jeu en équipe est d’ailleurs souvent favorisé.
Afin que le joueur puisse jouer et interagir avec le monde virtuel, il lui sera nécessaire de créer un avatar, représentation de lui-même, à l’intérieur du jeu. En effet, Il aura la possibilité de déterminer les caractéristiques de son personnage (choix du pseudo, sexes, coupe et couleur de cheveux, couleur des yeux, forme du visage, etc.). Il sera ainsi amener à personnaliser son avatar selon ses désirs et ses choix personnels. L’avatar, propre à chaque joueur, est donc unique et est l’incarnation virtuelle du joueur à l’intérieur de ce monde virtuel ; au même titre que chaque joueur est différent et caractérisé par sa personnalité propre ainsi que façonné au fil de son développement via des identification successives. L’un ne pouvant exister sans l’autre dans l’univers du jeu, ils sont indissociables et complémentaires. On pourrait alors parler de dyade joueur-avatar.

Ce n’est que récemment que les études et les recherches en psychologie quant aux jeux vidéo, et plus particulièrement quant à l’avatar, ont vu le jour. Il semble que les interrogations soient sans cesse plus nombreuses à mesure que ces recherches s’étayent et rendent l’approche des jeux vidéo par la psychologie difficile à cerner. Nous avons pourtant choisi d’étudier le thème des jeux vidéo en ligne massivement multi-joueurs afin de contribuer à enrichir les recherches en cyberpsychologie.
Ainsi, nous traiterons plus particulièrement ici de la dyade joueur-avatar c’est à dire que nous cherchons à comprendre les liens les unissant – s’ils existent bien. En allant plus loin on se demande dans quelle mesure l’avatar créé par le joueur peut nous renseigner sur des éléments de sa personnalité et nous aider à comprendre qui il est.
On se pose de fait d’emblée la question de savoir si « l’avatar est comme moi » ou si « l’avatar c’est moi ». En effet, lorsque « l’avatar est comme moi » on suppose que le joueur met une distance entre l’avatar et lui dans la mesure où il crée et incarne l’avatar pour jouer. L’avatar nous donne à voir une représentation de soi mais n’est pas soi. En revanche, quand « l’avatar, c’est moi ! » (Haji, 2009) ; le joueur et son avatar sont alors à priori confondues, sans distance entre eux : le joueur se projette dans l’avatar sans se différencier de lui. On se situe alors comme dans un fonctionnement en miroir de l’avatar. Il n’est que la copie numérique, le double du joueur dans le jeu. On se pose la question de la capacité de jeu du joueur dans ce cas précis. On peut alors penser que la manière dont les joueurs vont parler de leur(s) avatar(s) peut nous éclairer sur qui est le joueur. Il nous renseigne alors sur des éléments importants de sa personnalité.

Nous regarderons dans un premier temps du côté de la littérature afin de voir si d’autres auteurs se sont déjà posés ces mêmes questions et comment ils ont abordé l’avatar, en lien avec le joueur.
Nous observerons tout d’abord si les jeux vidéo peuvent être considérés comme un jeu comme un autre. Nous essayerons de distinguer le jeu normal du jeu pathologique afin de mettre en évidence qu’en l’absence d’une capacité de jeu il n’est pas possible pour l’enfant et pour l’adulte de faire « comme si », de faire semblant et d’être alors dans le play tel que défini par Winnicott.
Nous nous intéresserons par la suite aux jeux vidéo et principalement ceux dits MMORPG. Ils nous intéressent plus particulièrement dans notre recherche puisqu’ils permettent au joueur de choisir et façonner un avatar. Ainsi nous nous demanderons dans quelles mesures l’avatar peut être considéré comme « le prolongement de soi » (Tordo, 2011) du joueur dans le jeu.
Cela nous amènera à aborder les notions de projection et d’identification. En effet, nous supposons que le joueur projette des éléments de sa vie consciente et inconsciente dans son personnage. C’est par ce mécanisme que le joueur et l’avatar se retrouvent finalement intimement liés, dans une dyade indissociable. Au travers de cette projection, nous pouvons penser que le joueur s’identifie alors à son avatar. En jouant, le joueur deviendrait alors « un personnage-joueur » (Tordo, 2011) puisqu’il commence à parler de son avatar à la première personne où « les émotions du joueur sont celles de l’avatar » (Tordo, 2011).
Les notions de projection et identification sous-tendent la notion de personnalité. Nous tenterons de comprendre de quelle manière les différents auteurs abordent cette notion en psychologie, principalement du côté de notions telles que le Soi et la représentation de Soi.


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